Charte du Réseau action climat Canada

Préambule

Le Climate Action Network – Réseau action climat Canada (CAN-Rac) est le plus vaste réseau d’organisations travaillant sur les questions liées aux changements climatiques et à l’énergie sur le territoire que nous appelons aujourd’hui le Canada. Nous tissons des liens et bâtissons un consensus social fort pour une action climatique juste et transformatrice au Canada et au-delà des frontières, en adoptant un rôle d’intermédiaire à l’international.

Nous avons pour mission de lutter contre les changements climatiques par la création d’un consensus social visant la mise en œuvre de plans d’action climatiques détaillés impliquant tous les niveaux de gouvernement et basés sur les meilleures données scientifiques disponibles et un engagement éthique envers les savoirs traditionnels autochtones. Appuyée par des politiques, des objectifs, des échéanciers et des rapports, la réalisation de ces plans nécessite de collaborer avec les différents paliers gouvernementaux du Canada, les communautés des Premières Nations, Inuits et Métis, le secteur privé, les syndicats et la société civile. 

Les changements climatiques ne sont pas seulement un problème environnemental. Il s’agit d’un enjeu humain qui influence et aggrave les questions les plus importantes de notre époque, qu’il s’agisse de la santé, des inégalités économiques ou de la justice raciale. Les effets des changements climatiques sont ressentis par toutes les personnes et toutes les espèces sur Terre. Pour trouver des solutions qui fonctionnent, nous devons nous allier. 

En adhérant à la présente charte, les membres de CAN-Rac soutiennent la mission, le mandat et les activités du Secrétariat, du Réseau et de l’Organisation. Les principes suivants ont été définis comme lignes directrices durables : ils orientent et précisent les intentions des efforts collectifs déployés par le Réseau et le personnel de son Secrétariat.

S’appuyant sur ces principes, valeurs et lignes directrices, CAN-Rac est le fer de lance d’une voie audacieuse, juste et innovatrice pour l’action climatique sur le territoire de ce que nous appelons aujourd’hui le Canada.

Ce en quoi nous croyons

• Solidarité : Notre travail privilégie la solidarité, le respect des droits et de la souveraineté des peuples autochtones, soutient la lutte contre le racisme anti-noir et anti-migrant et veille aux principes d’équité. Ces valeurs guident l’approche du Réseau dans l’établissement de relations et la promotion de solutions climatiques transformatrices. Les solutions pour lesquelles nous luttons ne doivent laisser personne de côté et doivent donner la priorité aux communautés qui subissent une oppression systémique violente, notamment les femmes, les enfants, les communautés racialisées, les personnes 2SLGBTQ+, les personnes en situation d’handicape et les personnes vivant dans la pauvreté.

• Respect des droits et de la souveraineté des peuples autochtones : Nous appuyons le leadership des peuples autochtones et respectons les systèmes de connaissances et savoirs traditionnels autochtones. En tant que mouvement progressiste, nous reconnaissons que la souveraineté autochtone est fondamentale à la construction du monde que nous aspirons à bâtir. Nous nous efforçons de déconstruire le colonialisme de peuplement et d’entretenir des relations authentiques et respectueuses avec les nations autochtones.

• Ambition et abondance : Nous luttons pour une politique climatique ambitieuse et innovante, fondée sur une vision positive d’un futur à co-construire. CAN-Rac défend des solutions transformatrices qui accordent une place centrale aux principes de justice et d’équité à l’échelle des crises auxquelles nous sommes confronté.e.s. Notre travail est ambitieux et empreint d’espoir, inspiré par une conception audacieuse du monde que nous voulons bâtir, pas seulement influencé par celui dans lequel nous nous battons. Les solutions que nous proposons sont fondées sur le pouvoir collectif et l’audace.

• Responsabilité mondiale : Le Canada joue un rôle majeur dans la crise climatique et nous devons en tenir compte. La solidarité internationale doit donc être un principe directeur dans le travail de CAN-Rac. Faire preuve de solidarité avec les communautés qui se trouvent en première ligne des catastrophes climatiques, en particulier dans les pays du Sud, doit être une valeur fondamentale. En tant que réseau situé dans le Nord, nous savons que le Sud est frappé de manière disproportionnée par les changements climatiques alors qu’il n’a que très peu contribué à les provoquer. Nous nous engageons à agir en collaboration, solidarité et coalition avec les alliés des pays du Sud au sein du Climate Action Network International.

• Antiracisme : Nous sommes une communauté et un mouvement qui puise sa force de la diversité et s’efforce de bien comprendre et de reconnaître les préjudices perpétrés par le mouvement environnemental à différentes échelles, provinciale, nationale, internationale, mondiale. Nous veillons à ce que notre plaidoyer contre les changements climatiques soit activement antiraciste et qu’il soutienne la libération des personnes Noires et de couleurs et des immigrants.

• Mobilisation de masse et développement du mouvement : Bien que l’action pour le climat soit nécessaire à tous les niveaux, la crise climatique se produit à une échelle et une vitesse qui ne peuvent être traitées proportionnellement que par les gouvernements et les grandes institutions. Nous croyons profondément au pouvoir collectif et à la mobilisation citoyenne dans la revendication de changements concrets et transformateurs. Le rôle de la démocratie ne se limite pas aux urnes; CAN-Rac contribue à construire un mouvement fort en soutenant l’éducation, la mobilisation et l’engagement de ceux et celles qui vivent et travaillent dans ce que nous appelons actuellement le Canada. 

Comment nous travaillons

• Avec adaptabilité, en favorisant l’apprentissage et en restant imputable : Tous et toutes sont indispensables dans notre mouvement. Notre communauté est plus forte par son accueil et son inclusivité, favorisant le partage des connaissances, peu importe le niveau d’expérience de tout un chacun dans les espaces de justice sociale et de mobilisation. Nos espaces de concertation promeuvent la responsabilisation, la réflexion et l’apprentissage en continu. Nous nous efforçons de concilier avec respect, transparence et imputabilité, l’éventail de perspectives et d’approches existant au sein du Réseau, particulièrement lorsque nous rencontrons des désaccords internes et partageons des points de vue divergents.

• En privilégiant la prise de décision fondée sur des données probantes et dans le respect des savoirs autochtones : Nos recommandations en matière de politique et d’action sont élaborées non seulement selon ce qui est considéré comme de la « recherche scientifique », mais se fondent aussi sur les systèmes de savoirs autochtones. Elles tiennent compte des écarts de compréhension occasionnées par la stricte adhésion à une seule épistémologie.

• Par le biais de relations, de partenariats et de collaborations : Centrer les relations au cœur de nos actions est une pierre angulaire de CAN-Rac. Collaborer avec d’autres mouvements sociaux amplifie l’impact de notre travail et veille à ce que nous luttions pour un monde où personne n’est laissé pour compte. Nous privilégions une approche qui progresse « à la vitesse de la confiance » et témoigne d’une profonde réciprocité dans toutes nos interactions. Cette approche relationnelle nécessite de la patience, de l’empathie et la reconnaissance du leadership des communautés de première ligne. Lorsque possible, nous apportons un soutien direct aux communautés qui se trouvent en première ligne, notamment par la redistribution des ressources, et veillons à ce qu’elles puissent partager leur histoire et agir pour le climat comme elles l’entendent.

Nos « lignes vertes »  

Les « lignes vertes » suivantes fournissent une orientation stratégique veillant au développement d’un ensemble de déclarations politiques dynamiques qui reflètent pleinement les actions et initiatives soutenues par CAN-Rac. Ces orientations vertes ne se substituent pas à la politique, mais constituent la base sur laquelle les positions politiques de CAN-Rac sont élaborées. Elles permettront à CAN-Rac de développer des programmes politiques flexibles et stratégiques pouvant s’adapter à notre contexte politique, tout en s’appuyant sur un mandat politique clair du Réseau.

• La juste part du Canada dans l’effort mondial pour limiter le réchauffement à 1,5°C : Les principaux responsables de la crise climatique, incluant le Canada, se doivent d’agir à la hauteur de leur contribution aux changements climatiques. Cela implique de reconnaître l’ampleur de la dette écologique et le besoin particulier pour des mesures réparatrices envers les communautés du Sud et celles se trouvant en première ligne des conséquences des changements climatiques au Canada. Pour contribuer à sa juste part de l’effort mondial, les réductions d’émissions de gaz à effet de serre (GES) du Canada doivent être parmi les plus radicales et les plus importantes de la communauté internationale. En outre, le Canada doit sérieusement s’engager dans les efforts internationaux pour la réduction des émissions de GES et assumer un financement climatique considérable afin de soutenir et permettre la transition socioécologique des pays du Sud.

• Les mesures d’atténuation et d’adaptation, les pertes et préjudices climatiques, et les finances : des piliers complémentaires de l’ambition climatique : Les mesures d’atténuation et d’adaptation ont pour objectif de protéger les communautés et écosystèmes contre les effets néfastes des changements climatiques. Agir maintenant permettra de mitiger la hausse des risques associés au dérèglement du climat et les besoins en matière d’adaptation et de pertes et préjudices qui en découlent. Nous sommes à un moment critique de la crise climatique : nous ne pouvons plus nous permettre d’agir sur un seul de ces fronts. L’approche de CAN-Rac s’attaque à tous les fronts et exige un financement climatique non seulement adéquat, mais aussi – surtout – ambitieux afin de mettre en œuvre ces actions.

• Une transition juste pour se libérer des énergies fossiles : La science est claire : l’exploitation continue du pétrole, du charbon et du gaz est incompatible avec une planète habitable. Notre travail de concertation et de mobilisation vise à éliminer progressivement la production et la consommation de produits à base de combustibles fossiles en accélérant une transition qui se veut juste, durable et compatible avec la nécessité de limiter rapidement le réchauffement mondial à 1,5 °C avec un dépassement minimal.

• Un changement systémique plutôt que l’incrémentalisme : La crise climatique exige des gouvernements qu’ils assument leurs responsabilités et opèrent un changement systémique à la vitesse et à l’échelle requises. Le travail de concertation et de mobilisation politique de CAN-Rac insiste sur la nécessité de répondre à l’urgence climatique par des actions proportionnées à la crise. Nous croyons que le rôle de la société civile consiste à accroître le pouvoir collectif pour y parvenir, y compris, mais sans s’y limiter, au sein des gouvernements coloniaux, de leurs politiques et réglementations, malgré leurs limitations, ainsi que par le biais des mouvements populaires, de la création de communautés engagées, et en mettant à profit notre compassion afin de construire un monde plus juste et sécuritaire à notre façon. 

• Lutter contre la crise de la biodiversité : Nous soutenons la restauration et la conservation des écosystèmes naturels et nous reconnaissons l’interconnexion des crises de la biodiversité et du climat. Nous plaidons pour des initiatives qui priorisent la protection et la restauration des écosystèmes et paysages essentiels, tels que les forêts anciennes, les prairies, les tourbières, les milieux humides, ainsi que les systèmes aquatiques, les rivières, les glaciers, et d’autres sources d’eau vitales et indispensables pour la biodiversité et l’agriculture.

• Lutter contre écoblanchiment et veiller à la responsabilité des entreprises : Nous nous opposons directement à l’écoblanchiment et à la désinformation. Nous visons à mettre en lumière de véritables pistes de solutions climatiques tout en pointant du doigt les causes systémiques qui contribuent à la crise. Le concept de « pollueur-payeur » est un principe qui guide notre travail.

• L’action climatique essentielle pour notre bien-être collectif : Nous préconisons des politiques climatiques qui profitent à toutes les formes de vie et favorisent la création d’espaces habitables, accessibles et collectifs. Nous priorisons la création et le développement de transports en commun, de logements, de systèmes alimentaires, de transports et de télécommunications durables, abordables et responsables, qui supportent et accroissent la résilience des communautés.

• Une économie juste et équitable : Nous reconnaissons que le modèle économique néolibéral et extractiviste, qui domine actuellement, provoque de nombreux effets négatifs. Il occasionne de profonds préjudices aux personnes et aux écosystèmes planétaires supportant la vie, notamment par la privatisation, les accords commerciaux avec les entreprises, les mesures d’austérité ainsi qu’en agissant comme l’un des principaux moteurs de la crise climatique. CAN-Rac plaide en faveur d’une transition juste vers une économie de soin qui garantit une répartition équitable des richesses, des prix abordables et des mesures de sécurité sociale inclusives. Nous reconnaissons que la crise climatique est en grande partie causée par une minorité : les ultra-riches continuent d’en bénéficier de manière disproportionnée. Nous rejetons la notion trompeuse affirmant qu’une économie profitable à tous ne peut coexister avec un futur sans danger pour le climat. Notre travail politique est réalisé avec et soutient les personnes de toutes les industries et de tous les secteurs.

• Mettre fin au militarisme et à la guerre : La guerre a joué et continue de jouer un rôle considérable dans l’aggravation de la crise climatique. La justice climatique ne peut être atteinte que par la défense des droits humains et le démantèlement du militarisme et de l’impérialisme. Tant que les conventions et les institutions destinées à protéger les droits humains fondamentaux ne seront pas respectées, la coopération internationale pour la lutte contre la crise climatique restera fragile, incomplète et incohérente.