Dubaï, 13 décembre 2023 :
Lors de la COP28, la société civile et les pays et communautés en première ligne de la crise climatique ont créé une vague de soutien historique en faveur d’une transition juste, fondée sur la science, hors des énergies fossiles et vers les énergies renouvelables.
« L’ère destructrice des énergies fossiles touche rapidement à sa fin, comme le démontre l’accord final de la COP28 – bien que ce signal soit brouillé par des lacunes et des distractions dangereuses », a déclaré Caroline Brouillette, directrice générale du Réseau action climat Canada. « Le Canada et les autres pays riches et fortement émetteurs doivent maintenant prendre leurs responsabilités et s’assurer que la suite ne reproduise pas les échecs et les injustices des systèmes coloniaux et extractifs à l’origine de la crise climatique.
« Nous sommes venu.e.s à Dubaï pour un moment de vérité au cours de l’année la plus chaude jamais enregistrée. Les résultats de la COP28 apportent des victoires importantes, avec l’opérationnalisation du fonds pour les pertes et préjudices et la toute première reconnaissance mondiale du fait que les énergies fossiles doivent être reléguées à l’Histoire – et nous donne un jour de plus pour nous battre.
« Et nous devons nous battre pour que le Nord global fournisse enfin le soutien financier et technique nécessaire pour rendre cette transition énergétique inarrêtable. Et alors que les communautés du monde entier sont déjà confrontées aux impacts déchirants des crises convergentes du climat et de la dette, le Canada et les autres pays riches doivent assumer leur rôle et augmenter le financement de l’adaptation et des pertes et dommages.
« Le multilatéralisme ne tient qu’à un fil. À Dubaï, le Canada s’est efforcé de bâtir des ponts, mais il doit redoubler d’efforts pour rétablir la confiance et livrer la marchandise qui permettra d’atteindre les objectifs de Paris. »
Pratishtha Singh, analyste principale des politiques internationales au Réseau action climat Canada, a déclaré : « C.elle.eu.x qui portent le poids de la crise climatique – une crise créée par les nations riches très polluantes, dont le Canada – ne peuvent attendre plus longtemps pour obtenir des comptes et un soutien financier. C’est décevant de constater que le cadre de l’objectif mondial d’adaptation n’a pas fixé d’objectifs en matière de soutien financier et n’a pas répondu de manière adéquate aux appels des pays du Sud. Il est urgent de renforcer et de soutenir l’adaptation; cela doit donner le ton aux futures conversations sur la justice climatique. »
-
Cette COP a été marquée par des problèmes persistants en matière de transparence et de participation. L’accord sur le bilan mondial a été adopté alors que l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) n’était même pas présente dans la salle, une illustration des problèmes d’inclusion et d’équité qui ont entaché cette COP, tant au niveau du processus que sur le contenu de l’accord final.
-
La décision sur le bilan mondial comprend un appel historique à l’accélération de l’action au cours de la présente décennie en vue d’abandonner les combustibles fossiles. Bien que le texte laisse la porte ouverte au captage et au stockage du carbone, à l’hydrogène bleu, au nucléaire, à la biomasse et aux « carburants de transition », la dépendance à l’égard de ces technologies non éprouvées, et les efforts de dernière minute pour préserver l’industrie des combustibles fossiles ne sont pas conformes à une trajectoire alignée sur 1,5°C.
-
Sur le plan des politiques nationales, le Canada a adopté d’importantes mesures lors de la COP – et doit maintenir et accélérer le rythme pour faire du « consensus des Émirats arabes unis » une réalité au pays. Le rapport de progrès 2023 sur le Plan de réduction des émissions montre que le Canada doit travailler à rapidement combler les écarts pour arriver à son objectif de 2030. Le cadre sur plafonnement des émissions de l’industrie pétrolière et gazière, bien qu’imparfait, représente un premier pas indispensable vers la réglementation de l’industrie la plus polluante du Canada, et doit être renforcé et mis en œuvre rapidement. Entre-temps, en désignant l’Alberta « Fossile du jour », la communauté internationale a envoyé un signal fort indiquant que les politicien.ne.s favorables à l’industrie des combustibles fossiles ne doivent pas empêcher le Canada d’avancer.
Ces négociations pour la survie de la planète ont eu lieu à seulement 2 500 kilomètres de Gaza, où des milliers d’innocent.e.s ont déjà perdu la vie. Le Premier ministre Justin Trudeau s’est enfin joint aux appels internationaux en faveur d’un cessez-le-feu et doit accroître la pression pour que cela se produise. Le Réseau action climat Canada insiste sur le fait qu’il ne peut y avoir de justice climatique sans que prenne fin l’occupation de la Palestine et la décolonisation partout dans le monde, incluant à la maison.
Plus de réactions de la société civile canadienne :
André-Yanne Parent, Directrice générale, Réalité climatique Canada:
« Même si l’on voit bien l’étoile polaire, par l’intégration d’une mention explicite des énergies fossiles, il semble que la vue soit encore brouillée par l’épais smog de Dubaï. La science et les savoirs autochtones ne laissent aucune ambiguïté : pour arrêter la hausse des températures et assurer un avenir viable, nous devons équitablement sortir des combustibles fossiles et passer à un véritable zéro émission nette d’ici 2050. Fin de l’histoire. Les pays riches ont créé cette crise climatique. La CdP28 était l’occasion de réparer ce tort et de planifier adéquatement une réponse mondiale à la plus grande crise de toutes, de financer adéquatement les pays du Sud pour se reconstruire après les catastrophes climatiques, s’adapter au réchauffement climatique et construire des économies résilientes basées sur les énergies propres. Malheureusement, même si cette décision entre dans l’histoire, elle ouvre la voie à des failles dangereuses avec des technologies non éprouvées, maintient le capitalisme carbone et échoue en termes d’échelle, de moyens de mise en œuvre et d’équité. En tant que société civile, nous garderons les yeux rivés sur notre étoile polaire, élevant et amplifiant les voix des communautés les plus impactées et exigeant la justice climatique. »
Andréanne Brazeau, analyste des politiques climatiques, Équiterre:
« On peut vraiment dire que la COP28 est la COP de la vérité. Pour la première fois, au terme de décennies de lutte menée par les pays en développement et la société civile, on regarde la vérité en face : c’est la fin de l’ère du pétrole et du gaz. D’ici 2030, on devra rester vigilant(e)s pour éviter que cette transition hors des énergies fossiles soit ralentie par la promotion de fausses solutions auquel le texte fait référence, comme la capture et le stockage de carbone, les «carburants de transition», l’hydrogène bleu et même le nucléaire. Le Canada et les autres pays développés devront inévitablement accroitre l’aide financière et technologique offerte au reste du monde afin de garantir que la lutte contre la polycrise que nous vivons ainsi que ses résultats soient équitables et que personne ne soit laissé derrière. Nous n’attendons rien de moins qu’une ambition climatique accrue et une action accélérée de la part du Canada. C’est une question de justice climatique. »
Aliénor Rougeot, Gestionnaire de Programmes, Environmental Defence:
« Assurer une transition juste est non négociable. Chaque pays doit s’assurer du bien-être des travailleu.rs.es et des communautés impactés par la transition, qu’ils soient économiquement dépendants des secteurs polluants ou en premières lignes des projets industriels. C’est pourquoi nous saluons la création d’un Programme de Travail sur la Transition Juste à la COP28, qui offre un espace dédié aux pays pour se soutenir mutuellement dans la résolution de ce défi. Cependant, les partis ont échoué à faire de ce programme un espace de prise de décision, choisissant plutôt de créer un autre forum de discussion. Cette lacune aura des conséquences néfastes sur les travailleurs, les nations autochtones, les gouvernements locaux et les communautés qui ont besoin d’un soutien concret, pas de simples promesses. »
Ashley Torres, coordinatrice en mobilisation, Mères aux front:
« Pour nos enfants, pour les générations futures, pour ceux et celles qui souffrent déjà des conséquences du changement climatique, ce n’est pas suffisant. Bien que nous reconnaissions ce moment historique d’avoir un texte qui appelle les parties à abandonner les combustibles fossiles, ce n’est pas suffisant. En tant que mères, nous continuerons à nous battre localement pour que le Canada et le Québec en fassent plus. Nous continuerons à être solidaires avec ceux et celles qui sont les plus touché.e.s, en particulier les communautés autochtones et les États insulaires. Nos enfants méritent mieux ! »
Anne-Céline Guyon, analyste Énergie-Climat, Nature Québec:
« Enfin on sort d’une COP en nommant clairement qu’il faut s’éloigner des énergies fossiles dans le mix énergétique mondial. Oui le texte adopté aujourd’hui n’est pas parfait. Des pays continuent de bloquer mais on sort d’ici avec un nombre sans précédent de pays ayant clairement appelé à une véritable sortie des énergies fossiles. C’est un point tournant. Ceci dit, certaines des solutions nommées pour accélérer la transition énergétique mondiale sont inquiétantes et représentent des distractions dangereuses au regard de leur réelle efficacité, de leurs impacts sur les populations et sur les écosystèmes. Quant au lien entre la crise climatique et la crise de la biodiversité, nous ne pouvons que nous réjouir de voir inscrit la référence au Cadre mondial pour la biodiversité de Kunming-Montréal pour souligner le rôle de la protection, de la conservation et de la restauration de la nature autant dans l’atténuation que dans l’adaptation aux changements climatiques. Reste à voir comment la mise en œuvre s’opérera pour que les réponses à la crise climatique ne se fassent pas sur le dos du vivant et respectent le principe de justice climatique. »
-30-
Climate Action Network – Réseau action climat (CAN-Rac) Canada est le plus vaste réseau d’organisations travaillant sur les questions liées aux changements climatiques et à l’énergie au Canada. Il s’agit d’une coalition de 150 organisations opérant d’un océan à l’autre. Nos membres rassemblent des groupes environnementaux, des syndicats, des Premières Nations, des organisations de justice sociale, de développement, de santé et de jeunesse, des groupes religieux et des initiatives locales.
Pour plus d’informations ou pour organiser une entrevue, contactez :
Vicky Coo, Directrice des communications
comms@climateactionnetwork.ca
Crédit photo: Maria Jacquemin