Territoires non-cédés de la Nation algonquine anishinaabe [OTTAWA], 12 décembre 2024
Aujourd’hui, le gouvernement fédéral du Canada a annoncé son nouvel objectif climatique : une réduction de 45 à 50 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2035 par rapport aux niveaux de 2005.
Caroline Brouillette, directrice exécutive du Réseau action climat Canada, a publié la déclaration suivante en réponse :
« Les objectifs climatiques ne concernent pas seulement les émissions de gaz à effet de serre – ils orientent l’économie canadienne pour les années à venir.
« Le gouvernement fédéral aurait pu choisir un objectif qui fixe une vision audacieuse pour diversifier notre économie vers des sources d’énergie abordables et fiables, réduitre notre dépendance à l’égard des caprices des dangereux climatosceptiques, et construire une société plus équitable et plus résiliente. Le Premier Ministre Trudeau a plutôt choisi de céder. Ce faible objectif est profondément déconnecté de la juste part du Canada à l’effort climatique mondial et le niveau d’ambition que l’on voit dans d’autres pays.
« La classe politique a-t-elle la mémoire si courte lorsqu’il s’agit des catastrophes climatiques qui dévastent la vie des Canadien.ne.s ? L’année 2024 a été l’année la plus coûteuse jamais enregistrée pour les catastrophes météorologiques au Canada. Cela affecte déjà la santé des Canadien.ne.s, leurs primes d’assurance et leurs factures d’épicerie.
« Pendant ce temps, les campagnes de désinformation soutenues par l’industrie pétrolière et gazière et les efforts visant à faire reculer le progrès se multiplient dans notre pays et au Sud de la frontière. Il est alarmant de constater qu’à de rares exceptions près, nos politicien.ne.s s’engagent dans une course vers le bas, à un moment où nous avons besoin de leadership pour affronter pleinement les milliardaires qui profitent alors qu’il.elle.s mettent le monde en feu. »
« Dans les prochaines semaines, le gouvernement fera des choix qui déterminent notre capacité à atteindre et à dépasser ces objectifs, ou abandonnera à nouveau et réduira notre ambition. Les règlements sur l’électricité propre et sur le plafonnement de la pollution pétrolière et gazière doivent être accélérés et mis en œuvre sans plus tarder. »
Pour en savoir plus :
- Selon l’analyse du Réseau action climat Canada, la juste part du Canada dans l’effort mondial visant à limiter l’augmentation de la température à 1,5°C nécessiterait une réduction des émissions nationales de 80 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici à 2035. (Voir les recommandations complètes de CAN-Rac pour la prochaine contribution déterminée au niveau national du Canada).
- La faiblesse de l’objectif du Canada le met encore plus en porte-à-faux par rapport à ses alliés internationaux. Le Royaume-Uni a récemment annoncé qu’il réduirait ses émissions de 81 % par rapport aux niveaux de 1990 d’ici à 2035. L’objectif du Brésil pour 2035 (qui a été critiqué pour son manque d’ambition) vise à réduire les émissions de 59 à 67 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici à 2030.
- Des sondages récents montrent que sept Canadien.ne.s sur dix souhaitent que le prochain gouvernement fédéral fasse davantage pour lutter contre les changements climatiques.
- Le Canada est l’un des dix pays dont les émissions cumulées sont les plus importantes, ce qui lui confère une responsabilité historique considérable dans la crise climatique. Si l’on considère les émissions par habitant.e, il se situe dans les deux premiers pays.
- Bien que CAN-Rac encourage le gouvernement à s’efforcer d’atteindre et de dépasser l’objectif supérieur de 50 %, il est inhabituel sur la scène internationale de faire de l’objectif une fourchette. Une fourchette permet au gouvernement de s’attribuer plus de mérite que ce qu’il s’est réellement engagé à réaliser, et suggère une limite supérieure à l’ambition, alors que l’objectif devrait être d’accélérer les réductions d’émissions aussi rapidement et profondément que possible.
- En vertu de la loi sur la responsabilité en matière de carboneutralité, l’objectif pour 2035 devait tenir compte de quatre éléments : les meilleures données scientifiques disponibles, les engagements internationaux, le savoir autochtone et les conseils du Groupe consultatif pour la carboneutralité. Cependant, le Canada n’a pas envisagé la manière dont ces éléments devraient interagir les uns avec les autres. L’objectif 2035 n’intègre pas de manière significative les recommandations issues des savoirs autochtones, suivant un modèle de violence épistémique continue qui réduit l’engagement éthique et équitable avec les systèmes de savoirs autochtones, et continue d’exclure systématiquement les perspectives des Premières nations, des Inuits et des Métis de l’élaboration de la politique climatique.
- Comme l’a fait remarquer le ministre Guilbeault, il est essentiel que les provinces assument également la responsabilité et le leadership en matière d’action climatique. Des études récentes de l’Institut Pembina et de Clean Energy Canada ont révélé des lacunes importantes dans les efforts des provinces.
- En vertu de la loi sur la responsabilité en matière de carboneutralité, le gouvernement fédéral était tenu de fixer son objectif pour 2035 avant le 1er décembre 2024. Le fait qu’il n’ait pas rendu public son objectif à cette date crée un précédent inquiétant pour les gouvernements futurs.
- Le ministre Guilbeault a également annoncé que le Canada étudierait le rôle que l’élimination du carbone peut jouer dans la poursuite de la réduction des émissions, mais cet aspect n’est pas inclus dans l’objectif, ce qui est positif compte tenu de l’incertitude et du risque associés à ces technologies d’élimination du carbone qui n’ont pas encore fait leurs preuves. Toutefois, si le gouvernement – et l’industrie de l’élimination du carbone – considèrent que leur contribution à la réduction des émissions est risquée, ils devraient également être honnêtes quant au risque financier qu’ils ont imposé aux contribuables canadiens par le biais des milliards de dollars que l’industrie reçoit en subventions.
Citations:
Anne-Céline Guyon, Analyste Climat-Énergie, Nature Québec :
« En établissant sa cible climatique pour 2035, le Canada avait une opportunité en or. Celle de montrer au monde entier que malgré un contexte politique et économique difficile, l’action climatique ne doit être freinée mais au contraire accélérée. Malheureusement, le gouvernement fédéral est complètement passé à côté, laissant tomber au passage celles et ceux qui souffrent aujourd’hui, ici comme ailleurs, des impacts des bouleversements climatiques. »
Charles-Edouard Têtu, Analyste des politiques climatiques et énergétiques, Équiterre :
« Aujourd’hui, le gouvernement fédéral n’a fait que reporter à 2035 le haut de la fourchette de la cible de 2030. Cette cible n’est pas suffisamment ambitieuse par rapport aux défis auxquels nous faisons face et marque un ralentissement de l’ambition climatique au pays. Le gouvernement a choisi de se contenter des politiques et réglementations qui ont récemment été adoptées ou sont en cours d’adoption. Or, 71% des Canadien(ne)s souhaitent que le prochain gouvernement en fasse davantage en matière environnementale, tel que révélé dans un récent sondage Léger. Pour atteindre les objectifs annoncés aujourd’hui, le prochain gouvernement devra au minimum s’assurer de la bonne mise en œuvre des politiques actuelles et agir sur d’autres fronts comme les habitudes de consommation et la mobilité. »
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