Territoires non cédés de la Nation algonquine anishinaabe [OTTAWA], 16 juin 2025 :
Le Réseau action climat Canada est profondément préoccupé par la décision du Sénat d’expédier l’examen du projet de loi C-5, qui comprend le projet de Loi sur le libre-échange et la mobilité de la main-d’œuvre au Canada et la Loi visant à bâtir le Canada.
En acceptant d’accélérer la période d’évaluation du projet de loi C-5 et des changements majeurs qu’il propose, le Sénat manque à son rôle complémentaire de « second examen objectif ».
Tel que rédigé, le projet de loi C-5 mettrait en péril les processus démocratiques, la protection de l’environnement et les droits des Autochtones. Le projet de loi permettrait au Cabinet de préapprouver les grands projets d’extractions de ressources avant qu’ils soient soumis à un processus législatif et réglementaire superficiel et accéléré. Ce processus simplifié ne prévoit aucune participation publique et exclut de fait les citoyens et citoyennes de décisions qui les concernent.
Le projet de loi C-5 permet également au Cabinet d’exempter des projets de toute loi fédérale. Des projets dits d’intérêt national pourraient donc ne pas tenir compte des mesures de protection fédérales visant les espèces en péril, les écosystèmes vulnérables, la qualité de l’air et de l’eau, ainsi que les limitations des émissions de gaz à effet de serre.
En préapprouvant les projets, le projet de loi C-5 sous-estime la valeur des consultations et la capacité des communautés autochtones à donner leur consentement libre, préalable et éclairé. Les consultations sur un projet déjà approuvé, dans un délai raccourci, ne répondent pas à l’obligation constitutionnelle du gouvernement fédéral de consulter les peuples autochtones dont les droits pourraient être touchés par celui-ci. Le consentement doit être donné avant l’approbation du projet, et non pas obtenu d’une communauté autochtones après que le Cabinet ait déterminé qu’il est dans l’intérêt national.
Le Sénat ne doit pas adopter le projet de loi C-5 dans sa forme actuelle. Le gouvernement du premier ministre Mark Carney doit prendre le temps nécessaire pour rédiger une loi qui contribue véritablement à l’édification de la nation, plutôt qu’un projet de loi qui offre des raccourcis à l’industrie des énergies fossiles au détriment des normes démocratiques, de la protection de l’environnement et des droits des Autochtones.
Citations :
Alex Cool-Fergus, Directrice des politiques nationales, Réseau action climat Canada :
« Le projet de loi C-5 risque d’accroître la dépendance du Canada aux industries extractives pour des profits à court terme précaires et incertains au détriment de notre avenir sur cette planète. Ce projet de loi est un texte législatif rédigé à la hâte et de façon négligée pour accélérer l’approbation de grands projets d’extraction de ressources. Le Canada n’a pas besoin de dépendre davantage d’industries extractives non durables : nous avons besoin que le gouvernement fédéral trace un chemin vers la transition énergétique et ouvre la voie à une économie nette zéro. Le Sénat doit renvoyer le projet de loi C-5 à la Chambre des communes pour réécriture. »
France-Isabelle Langlois, directrice générale, Amnistie internationale Canada francophone :
« Amnistie internationale est très préoccupée par l’empressement du premier ministre du Canada, nouvellement élu, Mark Carney, et qui déjà cherche à outrepasser les processus parlementaires et démocratiques, en voulant à tout pris, par bâillon, faire adopter le projet de loi C-5. Cela constitue un précédent préoccupant, pour la suite des choses, et l’État de droit canadien. Nous demandons au Sénat de mettre tout son poids dans la balance, et exiger le respect du processus parlementaire. »
Dr. Moe Qureshi, directeur de la recherche et des politiques climatiques, Conseil de conservation du Nouveau-Brunswick :
« Le projet de loi C-5 représente un dangereux recul des garanties démocratiques, des protections environnementales et des droits des Autochtones. Le Sénat doit cesser de précipiter son adoption et garantir un examen public et parlementaire complet avant que de tels changements majeurs ne deviennent loi. »
Anne-Céline Guyon, analyste climat-énergie, Nature Québec :
« Il n’y a rien qui justifierait un tel passage en force! À même pas 2 mois après son élection, un tel geste du gouvernement Carney est inacceptable! Aucun projet d’intérêt national ne justifie de s’essuyer autant les pieds sur la démocratie et surtout pas ceux permettant l’expansion des énergies fossiles. Évidemment qu’en procédant de la sorte, des coins ronds vont être tournés et des pieds écrasés et ce sera forcément au détriment de l’environnement et du consentement des communautés autochtones et locales. Cela ne va garantir qu’une chose : la non acceptabilité sociale envers ces projets. »
Louis Couillard, responsable de la campagne climat-énergie, Greenpeace Canada :
« Utiliser le bâillon pour adopter un projet de loi qui peut soustraire les pipelines aux règles environnementales, c’est bâillonner la démocratie au profit des pétrolières. Gouverner par décret pour contourner les lois environnementales, c’est exactement ce que Harper faisait — Mark Carney promet du changement, mais recycle les pires pratiques conservatrices. Expédier l’examen du projet de loi C-5 est un non-sens, le Sénat doit plutôt renvoyer C-5 à la table à dessin. »
France Pomminville, directrice générale, Réalité Climatique Canada :
« En tant que société, nous ne pouvons pas bâtir un avenir prospère en sacrifiant nos principes démocratiques et notre engagement envers la protection de l’environnement. Le projet de loi C-5, tel que rédigé, ouvre la porte à des décisions prises à huis clos, sans consultations adéquates, et sans considération pour les limites écologiques de notre planète. À l’heure où les impacts climatiques s’intensifient, il est plus crucial que jamais que le développement se fasse dans le respect des droits des peuples autochtones, des processus démocratiques et de la science climatique. »
Patricia Clermont, organisatrice et porte-parole, Association québécoise des médecins pour l’environnement (AQME) :
« Impossible de ne pas être dans l’inquiétude alors que d’importants règlements pour protéger la nature, l’environnement et la santé (et donc la justice) risquent d’être mis de côté, au nom de l’économie extractiviste, des lobbys pétro-gaziers et en utilisant les contextes géopolitiques pour ainsi défaire des processus démocratiques essentiels. Or alors que l’acceptabilité sociale est de plus en plus liée aux inquiétudes des populations, qui réalisent à quel point la santé environnementale influe sur la santé humaine, et va de pair avec plus de justice pour tous et toutes. Nul doute que déjouer les processus d’examen ne calmeront pas ces inquiétudes, au contraire. »
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