Published On: juin 19, 2025

Territoires non cédés de la Nation Kanien’kehà:ka  [Tiohtià:ke/Montréal], 19 juin 2025 :

Les organisations environnementales, civiles et de santé prennent acte de la publication du Plan de mise en œuvre 2025-2030 du Plan pour une économie verte 2030 (PMO5) du gouvernement du Québec publié aujourd’hui. À mi-parcours, le Québec fait du surplace : l’effort climatique ralentit alors que l’urgence exige un virage beaucoup plus audacieux. 

Dans ce nouveau plan, le gouvernement annonce un budget de 10,1G$ sur cinq ans pour l’action climatique, l’adaptation et la décarbonation. Le financement repose principalement sur les revenus du marché du carbone qui demeure le pilier du modèle québécois. Ce montant ne doit cependant pas éclipser la nécessité d’évaluer la qualité, la cohérence et l’ambition des mesures, pas seulement leur ampleur financière. Malgré la consolidation de certains programmes et un budget record, ce plan manque d’innovation et ne met pas la province sur la trajectoire requise pour atteindre ses cibles climatiques.

L’instabilité du contexte économique et politique est évoquée à plusieurs reprises dans le document sans toutefois qu’elle  justifie le recul observé de certaines cibles climatiques ni l’absence des changements transformationnels nécessaires. Le PMO5 estime que les mesures définies et financées couvrent désormais 65 % de la cible de réduction pour 2030, contre 67 % dans le plan précédent (2024-2029). À mi-parcours de cette décennie critique, cette baisse est préoccupante et laisse planer des doutes quant à la capacité de la province à atteindre ses engagements climatiques. Elle s’accompagne aussi d’une diminution des réductions attendues dans les secteurs clés des transports, de l’industrie et de l’agriculture.

Le gouvernement met de l’avant la hausse majeure du budget pour l’adaptation depuis le tout premier plan d’action 2013-2020, maintenant à 1,3 G$. Dans les faits, le budget n’augmente en fait que de 68M$ par rapport à l’an dernier (+8%), alors que les efforts de reboisement après les feux de forêt de 2023, à eux seuls, ont coûté 200 M$

Malgré l’accent financier sur l’adaptation, il y a peu de nouvelles mesures structurantes : la majorité des actions détaillées renforcent des programmes existants. La santé reste également marginale dans la programmation. Le Plan Nature 2030 est mentionné sans annonce de nouveaux objectifs chiffrés ou une intégration forte de la nature dans la stratégie climatique, en dépit des attentes de la société civile et des engagements internationaux du Québec.

Sur le plan des mécanismes, le Système de plafonnement et d’échange de droits d’émissions (SPEDE) demeure le principal levier, couvrant 80% des émissions. Le PMO5 mentionne que le SPEDE sera modifié d’ici la fin 2025, mais sans plus de détails ni signal clair sur une réforme ambitieuse, bien que le contexte exige une tarification carbone plus efficace et équitable.

Dans les prochains mois, le gouvernement du Québec entamera une révision de sa cible climatique, actuellement insuffisante à sa juste part à l’effort mondial de réduction des émissions de GES.  Les organisations membres du Réseau action climat continueront à jouer leur rôle en appelant à une ambition renforcée, fondée sur les données probantes et les principes de justice climatique.

Citations : 

Leila Cantave, Responsable pour le Québec, Réseau action climat Canada :

« Alors qu’il nous promet de nous faire avancer, le Plan de mise en œuvre tourne en rond. Il maintient le moteur en marche, mais il ne nous emmène pas là où le Québec doit aller pour respecter ses engagements climatiques. À mi-parcours, il nous manque le virage décisif pour vraiment changer de direction. »

Anne-Céline Guyon, analyste climat-énergie, Nature Québec :

« Ce que j’aurai aimé voir dans cette mise à jour, c’est un gouvernement qui saisit à bras le corps la lutte aux changements climatiques comme levier d’action pour une économie québécoise résiliente face aux crises économiques, sociales et environnementales.  À la place, on a essentiellement un gouvernement dans une position attentiste qui se sert de la crise tarifaire avec les États-Unis comme prétexte pour réduire son ambition. À 5 ans de la cible 2030, il faut saisir toutes les opportunités, pas regarder le train passer.» 

Andréanne Brazeau, analyste principale des politiques – Québec, Fondation David Suzuki :

« À mi-parcours du Plan pour une économie verte, le Québec rate une autre occasion d’accélérer ses réductions d’émissions. Le gouvernement a les outils pour faire mieux, mais continue de les utiliser à moitié. Si l’approche en adaptation s’est renforcée, la réforme du marché du carbone attend toujours, alors qu’elle pourrait financer bien plus de solutions concrètes. Pendant ce temps, la crise climatique frappe notre système de santé, nos infrastructures et nos portefeuilles. »

Patricia Clermont, Responsable, Association québécoise des médecins pour l’environnement (AQME) :

« À force d’y aller à moitié, à force d’invoquer des contextes et des raisons de ne pas augmenter notre ambition et nos moyens, nos infrastructures, notre santé et les coûts qui s’y rattachent, les finances des ménages en pâtissent, et c’est encore pire pour les plus vulnérables. Plus et mieux de transport collectif, c’est plus de santé et d’équité, et d’économies pour les ménages. Sortir du gaz fossile, c’est aussi sortir de la boucle qui nourrit les changements climatiques et dont ultimement tout le monde souffre, et de plus en plus. Avoir de l’ambition pour le Québec, c’est aussi avoir de l’ambition, pour maintenant et désormais. »

Louis Couillard, Responsable de la campagne climat-énergie, Greenpeace Canada :

« Cette baisse d’ambition est décevante, mais loin d’être surprenante — le gouvernement Legault n’a jamais pris la lutte contre la crise climatique au sérieux. L’arrivée de Trump est l’excuse parfaite pour la CAQ de montrer son visage : celui d’un gouvernement qui abandonne ses responsabilités envers les générations futures. »

David Roy, Directeur général, Ateliers pour la biodiversité :

« Avec la sortie du Plan Nature l’an dernier, on aurait pu espérer que la biodiversité occupe une place plus importante dans le plan de mise en œuvre 2025-2030 du Plan pour une économie verte. Or, la nature y est de nouveau reléguée au second plan, et ce manque d’ambition globale pourrait compromettre notre résilience économique. Ces deux plans gagneraient à être pensés ensemble, car leurs objectifs peuvent autant se renforcer… que se nuire s’ils ne sont pas alignés. »

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Climate Action Network – Réseau action climat (CAN-Rac) Canada est le plus vaste réseau d’organisations travaillant sur les questions liées aux changements climatiques et à l’énergie au Canada. Il s’agit d’une coalition de 180 organisations opérant d’un océan à l’autre. Nos membres rassemblent des groupes environnementaux, des syndicats, des Premières Nations, des organisations de justice sociale, de développement, de santé et de jeunesse, des groupes religieux et des initiatives locales.

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